15-05-2017
France: Les législatives seront le troisième tour
On peut attribuer l’ampleur de la victoire à une deuxième semaine de campagne assez catastrophique pour Marine Le Pen. En particulier pendant le débat en face à face avec Macron: elle a été coriace, agressive et elle a marqué quelques points sur le thème de Macron candidat de la finance, de la continuité, etc. Mais sur l’économie et en particulier sur l’euro, sa prestation était mauvaise jusqu’à frôler l’incohérence. Macron n’avait pas besoin d’être très bon pour apparaître plus crédible.
L’élection présidentielle terminée, se profilent les législatives des 11 et 18 juin. L’enjeu est de taille: Macron n’est pas certain de rassembler majorité sans laquelle sa capacité à appliquer son programme sera limitée. Ainsi, tous les états-majors préparent la campagne: le parti du président, qui s’appelle maintenant « La République en Marche » (LRM), évidemment; mais aussi les autres partis, qui cherchent à se remettre en selle après la campagne présidentielle et à refuser sa majorité à Macron. Pour certains il s’agit de pouvoir ensuite marchander leur soutien, pour d’autres et notamment la gauche radicale, de mener une opposition conséquente à sa politique antisociale.
Déception pour le Front national
La candidate battue a obtenu 33,9% et 10,6 millions de voix; c’est encore beaucoup. Mais c’est nettement en-deçà des espoirs des cadres du Front national. Suffisamment pour que des critiques de la ligne «sociale» et le projet de sortie de la monnaie unique de Marine Le Pen et Florian Philippot, et plus largement la tentative de s’adresser aux couches populaires et aux électeurs de gauche, ont commencé à se faire entendre. De nombreux cadres du FN, peut-être la majorité, n’ont jamais vraiment été d’accord avec la ligne de Marine : ils l’ont acceptée tant qu’elle remportait des victoires, dans la séquence électorale de 2012 à 2015. Mais l’échec relatif du 7 mai a changé la donne. Personne ne lui reproche de ne pas avoir gagné, mais une meilleure fin de campagne aurait pu franchir la barre symbolique des 40%. L’analyse de la composition du vote le Pen au deuxième tour apporte quelques éclaircissements. Elle montre que malgré ses appels aux électeurs de gauche, seulement 7% des électeurs de Mélenchon et 2% de ceux d’Hamon ont voté Le Pen. A droite, 20% des électeurs de Fillon et seulement 30% de ceux de Nicolas Dupont d’Aignon, candidat souverainiste de Debout la France, qui avait pourtant apporté son soutien à Le Pen entre les deux tours et était prévu comme premier ministre. Des chiffres qui confortent l’analyse d’un élu FN du sud de la France «C’est une catastrophe. On paye un programme qui a fait fuir la droite», en lançant «des appels à la gauche, alors que la gauche ne votera jamais pour nous». Dans un de ces coups de théâtre qui ont tellement marqué cette campagne Marion Maréchal-Le Pen, qui aurait pu être le porte-voix de ces critiques a annoncé sa retraite de la vie politique pour des raisons personnelles, en précisant que ce n’était pas définitive. Certains pensent qu’il s’agit d’une fine manœuvre: partir pour revenir en force au moment choisi. Quoi qu’il en soit, le Front national rentre dans une zone de turbulences qui peut aboutir à une vraie crise. Les critiques, mises en sourdine pour l’instant, ne le seront plus après les législatives.
A gauche, on aurait pourtant tort de se réjouir trop tôt. Le FN est déjà passé par d’autres crises et a toujours rebondi. Le score de Marine Le Pen est quand même le plus élevé de l’histoire du parti. Et cinq ans de Macron, s’il arrive à trouver une majorité à l’Assemblée nationale reproduira les conditions qui alimentent le Front.
Macron : une victoire ambiguë
Si la défaite de Marine Le Pen a été amère, la victoire de Macron a été ambiguë. Avec 24% au premier tour et 66% au deuxième, il doit sa victoire à la volonté de battre Le Pen. Parmi les 52% des électeurs de Mélenchon, les 48% de ceux de Fillon, les 71% d’Hamon, et les 27 % de Debout la France qui ont voté Macron au deuxième tour, il est difficile de décerner un vote d’adhésion. D’ailleurs, parmi les votants pour Macron au deuxième tour, 43% cite l’opposition à Marine Le Pen comme leur motivation. Un tiers ont voté Macron pour le renouvellement qu’il prétend représenter; seulement 16% approuve son programme et 8% ont voté pour sa personnalité. Sa base est donc fragile et instable et par ailleurs fortement biaisée vers les couches aisées. Il peut compter sur une certaine dynamique dans le sillage des présidentielles, mais il est difficile d’en estimer l’ampleur. Un sondage quelques jours avant le deuxième tour donne 22% pour LRM, 20% chacun pour le FN et les Républicains, 16% pour la France insoumise. Un autre sondage entre le 9 et le 11 mai voit Macron à 29%, LR et le FN toujours sur 20% la France insoumise à 14% et le PS à 7%.
Tout en espérant un grand succès pour LRM, Macron ne peut pas tout miser là-dessus. Donc on le voit négocier avec des députés sortants qui ont un pied dans le PS et un pied dehors. Il semble qu’en fin de compte il y aura quelques dizaines de ces girouettes qui seront soit candidats LRM, soit laissés sans candidat LRM face à eux. En ce qui concerne les Républicains, dont les tensions internes sont d’un autre ordre que la crise existentielle que vit le PS, il semble qu’un nombre plus restreint de ses députés n’auront pas un candidat LRM en face. Il semble aussi qu’il y aurait un accord avec le MoDem de François Bayrou, mais comme tout ce qui entoure la campagne de Macron ces derniers jours, il y a des déclarations, des contre-déclarations et des démentis.
Ceux qui ont refusé de choisir
L’autre fait marquant du deuxième tour de cette élection présidentielle a été le niveau extrêmement élevé d’abstentions et de votes nuls ou blancs, sans précédent depuis 1969. Il y a eu 25,38% d’abstentions et 11,49% de votes blancs et nuls. C’est d’encore plus remarquable que le danger d’une victoire de Le Pen, bien qu’improbable, était loin d’être inexistant. Il y a deux façons d’aborder ce phénomène. D’abord, on peut critiquer ou dénoncer ceux qui n’ont pas voulu utiliser le bulletin de vote Macron pour bloquer la route à Le Pen. Il fallait certainement essayer de les convaincre avant le 7 mai. Mais en rester là, où faire de cette question un point de clivage, ne sert à rien. Il vaut mieux essayer de comprendre. Le phénomène est loin d’être totalement négatif, au contraire. Parmi ceux qui ont choisi de ne pas choisir le 7 mai, un très grand nombre ont fait leur geste pour signaler leur opposition totale à Macron, qui découlait d’un rejet de son programme et la compréhension que le jeune énarque représentait la continuité, probablement en pire, des politiques de ses prédécesseurs. Cette compréhension était par ailleurs partagée par un grand nombre de ceux qui ont voté pour Macron.
Jean-Luc Mélenchon a refusé de se joindre à ce qu’on appelle le «Front républicain» contre Le Pen le soir du premier tour, dont une bonne partie consiste d’antifascistes d’un jour tous les cinq ans. La France insoumise a organisé une consultation à laquelle 240,000 personnes ont participé – ce qui est en soi un camouflet pour ceux qui mettent en doute la réalité militante du mouvement – avec trois choix: voter Macron, voter blanc, s’abstenir. Le résultat était partagé, aucune position n’étant majoritaire. FI n’a pas pris position et Mélenchon a refusé de dire comment il avait voté. Cette démarche, très critiquée, était sans doute la seule qui garantissait l’unité de la France insoumise ;
Ce degré d’opposition à un président nouvellement élu est sans précédent. Il laisse présager non seulement des mobilisations dans la rue. Celles-ci auront lieu, et bientôt ; surtout si Macron persiste avec son intention de s’attaquer davantage au Code de travail par décret. Mais l’ampleur du refus de la politique de Macron doit aussi trouver son reflet aux législatives.
Où en sont les partis traditionnels?
Malgré la différence d’échelle, on voit des processus parallèles dans LR et le PS. Les plateformes «extrêmes» de leurs candidats présidentiels ont été recentrées. Benoît Hamon a pu constater, sans paraît-il avoir été consulté, que des pans entiers de son programme avait disparu, notamment le revenu minimum garanti et les questions écologiques. Il y a eu aussi un recentrage à droite, où la campagne législative de LR sera dirigée par François Baroin.
Dans le Parti socialiste, on peut identifier plusieurs cas de figure et plusieurs courants. Il y a ceux qui sont passés avec armes et bagages chez Macron, en claquant la porte du PS, à l’image de Richard Ferrand, aujourd’hui secrétaire-général de LRM. Il y en a qui tout en gardant leur carte du PS penchent vers Macron. Il y a l’appareil représenté par le secrétaire national, Jean-Christophe Cambadélis, qui essaie de maintenir le PS plus au moins debout, au moins jusqu’au lendemain des législatives. Et il y a des courants qui se forment, de gauche comme celui de Benoît Hamon ou du centre comme celui emmené par les maires de Lille et Paris, Martine Aubry et Anne Hidalgo et l’ancien Garde des sceaux Christiane Taubira. Où tout cela mène dépendra du score du PS aux législatives et des manoeuvres et reclassements autour de Macron.
Il n’est pas facile de prédire l’issue des législatives. Pour plusieurs raisons. D’abord, les sondages ont été faits avant que les différentes forces politiques ne soient en état de marche, n’ayant même pas clos leurs listes ou commencé leur campagne. Ensuite, une élection avec plusieurs forces politiques n’est pas la même chose que le duel classique gauche-droite. Déjà en 2012 nous avons assisté à un certain nombre de triangulaires (en général PS-droite-FN). Cette fois-ci ce sera encore plus compliqué. Le 23 avril, Macron était en tête dans 240 circonscriptions, Le Pen dans 216, Mélenchon dans 67, Fillon dans 54. A supposer, ce qui est loin d’être sûr, que ces résultats se reproduisent le 11 juin, cela nous dira pas grande chose sur le résultat. Non seulement parce que cela dépend du report de voix du premier tour, mais parce que tout candidat avec les suffrages de plus de 12,5% des inscrits au premier tour peut se maintenir au deuxième. Ce qui peut donner non seulement des triangulaires mais des quadrangulaires. Et dans ces cas-là c’est le candidat en tête qui est élu, même sans avoir 50% des voix. Ce qui peut aider le Front national, mais aussi la France insoumise.
Vu le nombre d’impondérables, et même à supposer que les sondages soient fiables, comme ils l’ont été grosso modo pour les présidentielles, il est particulièrement inutile de spéculer. Surtout, beaucoup de choses peuvent changer au cours de la campagne, comme la campagne présidentielle vient de le démontrer.
La campagne de la France insoumise
Jean-Luc Mélenchon et la France insoumise ont lancé leur campagne le 13 mai. Ils avaient annoncé qu’ils auraient des candidats dans toutes les 577 circonscriptions. Au 13 mai, seule une dizaine n’étaient pas encore couvertes. La grande majorité des candidats n’appartient à aucun parti (la double appartenance est autorisée). Mais un certain nombre, peut-être un quart, sont membres du Parti de Gauche, d’EELV, du PCF et même quelques-uns du PS. Il semble que dans tous ces cas il s’agit de gens qui ont soutenu la campagne présidentielle. Ces derniers jours il y a eu des négociations avec le PCF en vue d’un accord pour les législatives. Les rapports entre la France insoumis et le PCF ont été particulièrement compliquées au cours de cette campagne. Le PCF n’a pas apprécié que Mélenchon lance sa campagne début 2016 et a cherché pendant des mois à trouver un candidat unitaire. Dès le printemps 2016 de nombreux militants et cadres du PCF avaient rejoint la campagne de Mélenchon. Il fallait attendre novembre avant que le parti en tant que tel, après un débat difficile, apporte son soutien. A partir de là au niveau central le PCF a mené une campagne active de soutien à Mélenchon. Mais c’était son propre campagne, avec son propre programme, affiches, etc. Dès le mois de janvier, il y a eu des négociations pour une campagne commune aux législatives, qui n’ont pas abouti. Celles qui ont suivi le premier tour ont été tout aussi infructueuses. Mais il y aura des candidates PCF qui font partie des listes de la France insoumise, surtout ceux qui ont soutenu Mélenchon dès le début. D’autres n’auront pas de candidat FI en face. Il y a un certain nombre d’accords locaux et le 13 mai FI a annoncé qu’elle ne présenterait de candidats contre ceux du PCF qui avaient parrainé Mélenchon. Il faut sans doute attendre la date limite du dépôt de listes le 19 mai pour avoir une idée exacte.
Les conditions de la France insoumise dans ses rapports avec d’autres forces visaient à avoir une campagne nationale unique et pas un patchwork d’accords locaux, ni de campagnes parallèles. Elle a mis comme conditions qu’il y aura un programme unique (que personne n’était obligé de signer), une charte de conduite (que tous les candidats doivent signer) un financement commun et une discipline de vote dans la future fraction parlementaire. Cette démarche découlait de son but, qui était de devenir la première force de gauche et dans ses projections optimistes, d’avoir une majorité de gauche à l’Assemble nationale. Jean-Luc Mélenchon a annoncé sa candidature à Marseille face à un dirigeant socialiste de la ville. A l’accusation qu’il voulait affaiblir le PS (qui par ailleurs s’affaiblit tout seul) il a répondu que son but n’était pas de l’affaiblir, mais de le remplacer. Ce qui a le mérite d’être clair et logique. Cela ne veut pas dire que FI ne peut pas travailler ensemble à l’avenir avec des socialistes ou des Verts qui adoptent une position d’opposition claire à Macron.
Le résultat des élections législatives et surtout la force de la gauche radicale déterminerait la marge de manoeuvre de Macron. Mais en attendant il sera quand même président. Et même avant de s’installer à l’Elysée il a eu deux douches froides. Pendant la campagne il avait eu le soutien indéfectible de toute l’Europe libérale. Une fois élu on l’a rappelé à l’ordre. Jean-Claude Juncker a déclaré que les Français dépensaient trop et mal – entendre, sur les services publics. Et Merkel a fait comprendre qu’il n’y aurait pas de changement des règles pour l’aider et que son premier devoir était de «réformer» la France. De manière hautement symbolique, le premier voyage à l’étranger du nouveau président, le 15 mai, sera à Berlin.
15-05-2017
Algérie, l’autre 8 mai 1945
Ce jour là, dans toute l’Algérie, des manifestations sont organisées pour fêter la victoire des alliés mais aussi pour rendre hommage aux nombreux soldats algériens engagés dans la guerre en Europe. Marseille et Toulon ont été libéré par des régiments de tirailleurs algériens et plusieurs milliers d’entre eux trouveront la mort en France, en Allemagne ou en Italie.
La revendication nationale ayant pris de l’ampleur en Algérie pendant la guerre, le Parti du peuple Algérien donne aux défilés une forte connotation indépendantiste.
A Sétif, c’est le drapeau algérien qui met le feu aux poudres. Le préfet ayant ordonné aux forces de police de «tirer sur tous ceux qui arborent le drapeau algérien», le commissaire ne se fait pas prier: il fait tirer sur les manifestants. Le premier manifestant tué est un jeune scout, Bouzid Saâl. Pacifiques, les manifestations dégénèrent en émeutes et 102 européens sont tués. La répression de l’armée française intervient brutalement dans toute la région. Manifestants fusillés sommairement par centaines, femmes violées… L’aviation mitraille et bombarde les villages de montagne. Les navires de la marine bombardent les douars de la montagne kabyle. Et les colons, organisés en milices, participent aux massacres. Le général Tubert, membre de la commission d’enquête chargée de faire la lumière sur ces événements, avance le chiffre d’environ 1000 morts, mais les historiens s’accordent à parler de 20 000 à 30 000 victimes… De par la radicalisation que ces massacres ont engendrés, certains historiens les considèrent comme le véritable début de la guerre d’Algérie. L’écrivain algérien Kateb Yacine, lycéen à Sétif à cette époque l’exprime ainsi: «C’est en 1945 que mon humanitarisme fut confronté pour la première fois au plus atroce des spectacles. J’avais vingt ans. Le choc que je ressentis devant l’impitoyable boucherie qui provoqua la mort de plusieurs milliers de musulmans, je ne l’ai jamais oublié. Là se cimente mon nationalisme.»
Reconnaissance tardive par la France
La France n’a jamais reconnu officiellement les massacres jusqu’en mars 2005, soit plus de 40 ans après l’indépendance, quand l’ambassadeur de France en Algérie, Hubert Colin de Verdière parla des massacres de Sétif comme d’une «tragédie inexcusable». Et c’est François Hollande qui fut le premier chef de l’État à reconnaître les massacres et de déclarer, lors d’une visite à Alger en décembre 2012: «Pendant cent trente-deux ans, l’Algérie a été soumise à un système profondément injuste et brutal. Je reconnais ici les souffrances que la colonisation a infligées au peuple algérien. Parmi ces souffrances, il y a les massacres de Sétif, Guelma et Kherrata.»
Malgrè cette reconnaissance symbolique importante vu le contexte, la France reste enfermée dans une logique néo-coloniale vis-à-vis de ses anciennes colonies et la droite et l’extrême droite semble toujours décidée à imposer son Histoire officielle et continuer à vanter le «rôle positif de la présence française outre-mer»…
05-05-2017
Élections en France: le chaînon manquant
Certaines réactions face aux résultats du premier tour des élections présidentielles en France m’obligent de réagir. Dans ce contexte, j’aimerais souligner quatre aspects sous-estimés cruellement, à savoir les conséquences d’une victoire de Marine Le Pen et du FN, mais également celles d’une victoire d’Emmanuel Macron, l’importance du chaînon manquant – la mobilisation sociale et citoyenne et, enfin, l’indispensable recomposition de la gauche.
1) Sous-estimer Marine Le Pen
Contrairement à maints commentateurs, j’estime que le débat télévisé du 3 mai entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen – tout comme ses prises de positions antérieures – a montré clairement que la candidate du Front National dispose bien d’un projet politique pour sa présidence: ancrer vigoureusement la haine, la discrimination et l’exclusion dans la société française et dans les institutions de la République, ceci sur le fond d’une orientation économique protectionniste et néolibérale, cette même orientation engendrée par les politiques de pensée unique au pouvoir presque partout dans le monde et affreusement favorisée en France sous le quinquennat de Hollande. Une orientation qui a créée – suite à la marginalisation et à la précarisation de larges couches populaires – la base du mécontentement duquel le FN tire sa popularité et son soutien électoral.
La sous-estimation des conséquences de la prise de pouvoir d’une Marine Le Pen et du Front National auprès de couches de la population de plus en plus larges semble évidente. Elle est aussi évidente que la sous-estimation des conséquences du succès électoral d’un Adolf Hitler et du NSDAP en Allemagne le 31 juillet 1932, ayant finalement abouti à la prise de pouvoir des nazis. J’estime que la gauche a un devoir d’explication voire d’éducation – ceci par des moyens pédagogiques adaptées, mais sans concession quant au contenu – de ces couches populaires qui voient dans Le Pen et le FN la seule alternative à la politique désastreuse actuelle.
Malheureusement, les conséquences réelles de la conquête du pouvoir par Marine Le Pen sont également sous-estimées fatalement par une grande partie de la gauche. Le fait que deux tiers des membres de ‘La France insoumise’ veulent s’abstenir ou voter blanc ou nul lors du 2e tour des élections présidentielles illustre parfaitement cette déroute. Il y a ceux qui croient que de toute façon l’accession au pouvoir de Marine Le Pen est inévitable et que, partant, il serait préférable d’aborder et faire passer cette période pénible le plus vite possible. Or, ils se trompent doublement. D’abord la conquête du pouvoir par le FN n’est pas inévitable, même dans 5 ans ou plus tard; tout dépendra des mobilisations sociales et citoyennes contre l’exclusion et la discrimination, contre la politique néolibérale désastreuse pour la majorité de la population et, évidemment, de la capacité de la gauche de démontrer la crédibilité d’une politique alternative (voir point 3 ci-dessous).
Ensuite, il y a ceux qui estiment que la mobilisation nécessaire pour changer la situation politique serait plus simple sous une présidente qui s’appelle Marine Le Pen que sous celle d’un Emmanuel Macron. Hélas, ils se trompent également de façon cruelle; dès que Marine Le Pen sera élue, elle usera fortement des pouvoirs réservés au président de la République pour criminaliser la mobilisation sociale, pour institutionnaliser la haine, l’exclusion et la discrimination et pour faire la chasse aux militants de gauche. Dans cette besogne elle sera largement épaulée par l’apparition publique de milices d’extrême droite, qui créeront la base pour un large éventail d’interdictions et de représailles d’Etat. Lors du débat télévisé du 3 mai, Marine Le Pen a livré un certain nombre de points d’illustration de cette volonté. Et n’oublions surtout pas les conséquences de la politique de Le Pen et du FN que subiront les réfugiés, les immigrés les sans papiers, les Roms, les musulmans et les minorités.
Avec le sacre de Le Pen au pouvoir, plus besoin de parler de cordon sanitaire autour du FN, un cordon qui, de toute façon, est de plus en plus troué. Après l’accession au pouvoir de Marine Le Pen, celle-ci sera courtisée par des secteurs de plus en plus significatifs de la bourgeoise, qui verra s’approcher le moment, où la politique néolibérale sera plus sûre sous le régime autoritaire de Le Pen.
L’espoir d‘aucuns qu’un grand nombre d’abstentions affaiblira considérablement Macron dans son mandat, est certes compréhensible, mais fort dangereux. D’abord parce que Le Pen n’a pas encore perdu le 2e tour, et, surtout, parce que cette attitude fait preuve d’un fatalisme inouï et dangereux dès qu’elle ne s’appuie pas sur une mobilisation large et convaincante dans les rues.
2) Sous-estimer Emmanuel Macron
Ceux qui sous-estiment les conséquences de la prise de pouvoir d’Emmanuel Macron sont aussi nombreux que ceux qui sous-estiment les conséquences d’une victoire de Marine Le Pen. Pourtant, il ne faut pas se tromper sur les conséquences graves de la politique libérale de Macron, l’austérité, la restriction des droits des travailleurs et des syndicaux et tout ce qui en découle pour de larges couches de la population; cette même politique qui prépare le terrain et crée la base pour renforcer d’avantage le Front National. (*)
En dehors des ‘Républicains’, qui retrouvent dans Macron l’orientation libérale qui leur semble parfaitement adaptée aux besoins de l’économie capitaliste française dans l’état actuel, il y a tous ceux, sociaux-démocrates et verts, qui considèrent qu’Emmanuel Macron constitue le meilleur garant d’une prolongation cohérente des politiques néolibérales instaurées sous Hollande. La liste des sociaux-démocrates et des verts qui soutiennent non seulement Macron contre Le Pen, mais qui adhèrent complètement à l’orientation politique d’Emmanuel Macron, est assez longue, en France comme ailleurs, y compris au Luxembourg (pour ne citer que Franz Fayot et Robert Goebbels).
Il y a également ceux qui estiment nécessaire de se rallier à Emmanuel Macron dans le but de battre Le Pen au 2e tour, sans être d’accord avec l’orientation de Macron, tout en laissant tomber leur critique du candidat de ‘La France en marche’, ne serait-ce que pour éviter toute entrave à l’élection de Macron contre Le Pen. C’est la logique fatale et fatidique du «moindre mal».
Enfin, il y a ceux qui estiment qu’il n’y a aucune justification pour voter Macron contre Le Pen, soit parce que la politique de Macron serait aussi néfaste que celle de Le Pen («ne pas choisir entre la peste et le choléra»), soit parce qu’ils sont convaincus que la politique de Macron ne fera que préparer l’arrivée au pouvoir de Le Pen au plus tard en 2022. Là encore, il s’agit d’une double erreur. D’un côté cette attitude sous-estime la différence entre un quinquennat de Macron et de Le Pen: sous Macron, les libertés d’expression et de mobilisation ne pourront être remises en question aussi radicalement que sous Le Pen. D’un autre côté, l’opposition à la politique libérale et d’austérité de Macron ne se fera pas dans les urnes d’un ballotage, mais dans la rue.
3) Le chaînon manquant
Pour toutes ces raisons, le chaînon manquant de toute opposition réelle et efficace aussi bien à la politique de Le Pen et du FN, qu’à celle de Macron et de ces adeptes de droite et de gauche, c’est la mobilisation de la société, la mobilisation sociale et citoyenne dans la rue, dans les entreprises, les universités, les villes et les quartiers.
Seule la mobilisation citoyenne large, surtout des jeunes et des travailleurs, saura faire évoluer la conscience politique et les rapports de force en France, aussi bien qu’ailleurs.
Et cette mobilisation dans la rue contre le FN, l’austérité et les politiques libérales, fait cruellement défaut. La faute en incombe également à la gauche, qui a volontairement renoncé à ce moyen d’influencer sur la politique et les élections. Il ne suffit pas d’appeler à la participation à un premier mai, comme parenthèse entre deux échéances électorales, pour changer la donne. L’appel à la mobilisation aurait dû être lancé dès le soir du premier tour. Le 1er mai aurait pu être un moment culminent d’une mobilisation large et forte. C’est le vote contre Le Pen, forcément pour Macron, qui devrait constituer la parenthèse d’une mobilisation qui barre la route au FN et qui se dirige contre toute politique libérale, qu’elle émane de Le Pen ou de Macron; c’est la mobilisation qui affaiblira Macron dans sa tentative de mettre en œuvre sa politique d’austérité, et non pas la seule abstention.
Tout ceci est la raison pour laquelle j’avais noté sur Twitter, dès 22.00 heures du soir du premier tour, sous le hashtag #Presidentielle2017: «Voter Macron sans rien faire d‘autre ne changera rien. La mobilisation dans la rue sera la clef du changement nécessaire.» Et un peu plus explicite sur mon compte Facebook: «Voter Macron au 2e tour sans rien faire d‘autre ne changera rien; Macron continuera à préparer la voie royale à Le Pen. La mobilisation large dans la rue contre le FN, l’austérité et les politiques libérales sera l’élément indispensable pour un changement réel.» J’estime toujours que cette note, bien que brève, était assez claire: le vote contre Le Pen et pour Macron au 2e tour est nécessaire, mais «voter Macron sans ne rien faire d‘autre» ne suffira pas, «la mobilisation large dans la rue contre le FN, l’austérité et les politiques libérales sera l’élément indispensable pour un changement réel.»
Je regrette cette absence de mobilisation et d’appel à la mobilisation de la part des organisations de gauche ; à mon avis, cette renonciation était une erreur fatale. Il est normal que le 1er mai il n’y avait même pas le million de citoyens dans la rue, que les organisations syndicales, de gauche et antiracistes avaient mobilisés avant le 2e tour de vote entre Jacques Chirac et Jean-Marie Le Pen en 2002. Et il est très parlant que parmi les trois options soumises par Jean-Luc Mélenchon aux membres de ‘La France insoumise’ (abstention, voter blanc ou nul, voter Macron contre Le Pen) ne figurait pas celle d’un vote Macron, pour barrer la route à Le Pen, associé à une large mobilisation dans la rue contre le FN, l’austérité et les politiques libérales.
4) L’indispensable recomposition de la gauche
Un dernier point, que j’aimerais souligner, est l’indispensable recomposition de la gauche. La social-démocratie européenne a vaillamment préparé son autodestruction depuis des décennies, aussi bien en Europe qu’en France. Le quinquennat de Hollande n’était que l’acte final de l’affaiblissement, voire du naufrage de la social-démocratie, qui pourtant n’est pas encore à sa fin, mais qui – faisant partie des politiques libérales et pro-capitalistes – ne saura plus jamais constituer une alternative de gauche à une telle politique. Benoît Hamon, bien que porteur d’un programme social-démocrate plus à gauche, en a du subir les frais, une grande partie des socialistes ayant considéré Emmanuel Macron comme la suite plus logique de la politique d’Hollande, que le malheureux Hamon.
La social-démocratie est dans une crise historique, d’où elle ne sortira que par scissions et recompositions à gauche de la gauche traditionnelle.
Le mouvement ‘La France insoumise’ de Jean-Luc Mélenchon a sans doute su mobiliser une partie de la population qui s’oppose aux politiques austères de gauche et de droite. La mobilisation électorale était très importante; les résultats électoraux dans de nombreuses villes et de nombreux quartiers populaires en sont la conséquence. Néanmoins, les ambiguïtés au niveau de l’orientation politique de ce mouvement (dont le souverainisme au lieu de l’internationalisme, la politique keynésienne contre la politique néolibérale, …) tout comme celles au niveau du fonctionnement interne peu démocratique et peu propice aux débats nécessaires sur l’orientation politique, empêcheront que la reconstruction d’une gauche authentique en France passe par la croissance linéaire de ce mouvement vers une alternative de masse crédible et capable d’offrir une issue au capitalisme en crise.
Une gauche alternative ne sortira pas non plus du renforcement linéaire du NPA (dont le candidat présidentiel était le très remarqué Philippe Poutou), bien que pour des raisons contraires à celles concernant ‘La France insoumise’; il s’agit là plutôt de l’incapacité du NPA de porter le débat et de s’ancrer dans des couches populaires plus larges, malgré une orientation stratégique très claire quant au nécessaire dépassement, voire chute du système capitaliste.
Le besoin d’un parti, voire d’un mouvement de gauche alternatif, antilibéral et anticapitaliste, qui saura combiner une telle orientation stratégique aux préoccupations et mobilisations actuels des citoyens, travailleurs et jeunes, est évident.
Ce n’est pas le 3e tour des élections, à savoir les élections législatives en juin, qui saura faire émerger une telle gauche alternative. Or, l’indispensable recomposition de la gauche autour d’une orientation sans ambiguïté ne saurait empêcher des accords et plateformes électorales de gauche, tout en sachant que n’importe quelle politique électorale ne saura remplacer le processus de recompositions ancré dans les luttes sociales et les luttes de classes. Ce processus sera long, mais aussi nécessaire que bénéfique pour l’humanité.
[Publié d’abord sur le blog de Justin Turpel www.justin-turpel.lu le 4 mai 2017]
(*) cette phrase était tombée en souffrance lors de la première mise en ligne, le 4 mai, et a été rajoutée de nouveau le lendemain.
28-04-2017
Der Arbeiter verschwand, die rote Farbe blieb
Eine kleine kunsthistorische Studie von Plakaten zum Anlass der traditionellen 1.Mai Feiern in Luxemburg.
Sowie der Osterhase und buntgefärbte Eier zu Ostern gehören, so gehören ebenfalls zum traditionellen Fest der Arbeit am 1.Mai bestimmte Rituale , Arbeiter und Freiheitslieder, Abzeichen, Spruchbänder, Maikränze, Schilder und nicht zuletzt Plakate die das eigentliche Thema dieses Artikels sind.
Angefangen hat das Ganze am 1.Mai 1886 mit einem Generalstreik von Arbeitern in Chicago, die für den Achtstundentag demonstrierten. Als es am Rande der Streikkundgebung Krawalle mit Toten und Verletzten gab, wurde dieser 1.Mai als Stichtag für die weltweit stattfindenden alljährlichen Feiern zum «Tag der Arbeit» erkoren.
Was hat sich nun im Laufe der fast 120 Jahren bei den Feierlichkeiten verändert und was nicht?
Meist begannen die Maifeiern mit Böllerschüssen der Bergarbeiter. Danach wurden Maikränze mit dem frisch spriessendem Laub gebunden. Anschliessend wurde der 1. Mai dann feierlich in einem Umzug mit Musikkapelle, Gewerkschaftsvertretern, Politikern und schlussendlich den Werkstätigen selbst abgeschlossen. Danach gab es dann öffentliche Kundgebungen mit den üblichen Reden von Gewerlschaftsführern wo dann die neuen sozialen Forderungen für das anstehende Jahr verkündet wurden.
Vieles von dem ist heutzutage (leider) verschwunden so z.B Die rote Fahne die immer am Anfang des Umzuges mitgetragen wurde oder die rote Nelke als deren Ersatz wärend der Nazizeit. Die Arbeiterlieder sind verstummt. Die Umzüge sind durch lokale Feste der Kulturen ersetzt worden . Alles ist friedlicher geworden. Die Forderungen sind weniger radikal, Berlin Kreuzberg und Hamburg Schanzenviertel ausgeschlossen.
Heute wird dieser freie Tag eher zu einem Ausflug ins Grüne genutzt. Die Teilnahme
an den von den Gewerkschaften organisierten Feierlichkeiten interessiert immer weniger Leute. Der Artikel der «Welt 24» des 1.04.2016, «Das proletarische Klassenfest verkam zur Grillparty» beschreibt diese Tendenz besonders gut.
Darüber muss man nicht besonders erfreut sein, haben doch unsere Väter und Grossväter für viele sozialen Errungenschaften gekämpft von denen wir heute noch profitieren. (wie z.B die 40 Stundenwoche).
Von den Traditionen ist leider vieles verschwunden oder wird nur noch lauwarm aufge- kocht.
Jedoch wurde bis zum heutigen Tage beibehalten, die grossen Werbeplakate am Rande der Strassen, die jedes Jahr die Bürger zum Mitmachen an den Feierlichkeiten zum 1. Mai aufrufen.
Analysiert man sie chronologisch (international sowie national), kann man verschiedene interessante Entwicklungen feststellen.
Erstens haben sich die Forderungen, Slogans auf den Plakaten nicht viel verändert .
Sie werden gebetsmühlenartig wiederholt und verlieren so ihre wahre Wirkungskraft. Man nimmt sie kaum mehr wahr oder man hat den Glauben an sie längst verloren.
Eine Analyse der Werbeplakate des DGB (Deutscher Gewerkschaftbund ) vom 1950 bis
heute lässt eine Redundanz der Forderungen erkennen :
Frieden, Freiheit, Gerechtigkeit, Mitbestimmung, Solidarität, soziale Sicherheit und soziale Gerechtigkeit. (letztere zum ersten Mal 1998) .
Aha! Da glaubte Martin Schultz wohl er hätte ein neues Thema entdeckt!
Zweitens gibt es auch in Punkto Stil interessante Entwicklungen zu erkennen.
Bis in die 50ger Jahren hinein waren die Plakate immer von der vorherrschenden Kunstrichtung beeinflusst. Zuerst vom Jugednstil, dann in den 20ger Jahren vom russischen Konstruktivismus. Danach wurden fast alle Plakate, bis zum Tode von Stalin, von dem sogenannten «Russsischen Realismus» geprägt.
Drittens stellt man radikale, ikonographische Veränderung in den Plakaten fest.
Ab den 60ger Jahren ist der Arbeiter, respektiv seine Arbeitsstätte (Fabrik) vollständig als Motiv verschwunden! Dominant ist ab jetzt das Motiv der Familie, die rote Nelke (70gern)
Kinder und Jugendliche (80gern), abstrakte Formen (90gern) oder nur noch Wörter (2000-2017)
Warum das so ist?
Nun einige Ursachen sind wohl klar. Die Deindustrialisierung unserer westlichen Länder,
die Vorrherrschaft der Dienstleistungsgesellschaft. Die Digitalisierung und sich weiter
entwickelnde Robotorisierung haben mit sich gebracht dass der Prozentsatz der Arbeiter in der Bevölkerung stetig abgenommen hat. In Deutschland betrug ihr Anteil nur noch 26,2
Prozent , 1970 lag er noch bei 47,3 Prozent.
Viertens kann man bei der Analyse feststellen dass eine Sache sich nicht so radikal verändert hat.Die Farbe Rot lebt noch immer, obschon in einem bescheideneren Masse.
Sie erinnert einen daran, dass sozialistische Gewerk-schaften massgeblich an der Entwicklung des Sozialstaates beteiligt waren und noch sind.
Und wie steht es mit den alten Arbeiterliedern? Müssen die nicht erneuert werden?
Ich glaub schon.
«Ich gehe nicht zur Demo, na,na,na,na
sondern ich fahr lieber zum Kurzurlaub
nach Mollorca ca ca ca ca…»
Quellen zu diesem Artikel:
100 Joer fräi Gewerkschaften 1916-2016 (OGBL)
OGBL Aktuell – November 2016
DGB Bundesvorstand: «Der 1.Mai: Plakate und Slogans seit 1950»
Die Welt.de : «Das proletarische Klassenfest verkam zur Grillparty»
Die Welt 24: «Tag der Arbeit: Es begann mit einem Massaker»
Lemo, Lebendiges Museum Online: «Der 1 Mai Tag der Arbeit»
BPD Gesellschaft für Medien Geschichte Politik: «Historische Plakate»
Bundeszentrale für politische Bildung: «Die soziale Situation in Deutschland »
28-04-2017
Le tournant d’avril 1917
Le mois d’avril représentait, à plusieurs points de vue, un tournant, une clarification dans le processus révolutionnaire. D’abord Lénine revient en Russie. Ensuite advient la «crise d’avril» autour de la question de la guerre. Enfin les mencheviks poursuivent la logique de leur ligne en intégrant le Gouvernement provisoire.
Le mois de mars avait été marqué par la formation des soviets et par l’affirmation de l’activité publique légale des partis politiques, l’apparition des journaux, etc. A la chute de la monarchie et la victoire de la révolution de février, tous les détenus politiques ont été libérés des prisons. Ceux qui se trouvaient en exil en Sibérie ou à l’étranger ont évidemment mis du temps pour revenir. Ainsi, par exemple, parmi les principaux dirigeants bolcheviques, Staline et Kamenev rentrent de Sibérie à la mi-mars, Lénine, Zinoviev et d’autres arrivent de Suisse début avril.
Ces retours en série ne seront pas sans conséquences. Ils conduisent à des changements d’orientation. Pendant la révolution de février, les bolcheviks étaient dirigés par un triumvirat formé par Chlyapnikov, Molotov et Zaloutsky, dont aucun n’était membre du comité central. Le comité de Pétersbourg ayant été décimé par des arrestations, ils s’appuyaient surtout sur le comité de Vyborg, quartier ouvrier combatif. Cette situation a duré jusqu’au 15 mars, quand Staline et Kamenev, membres, eux, du CC arrivent à Pétersbourg et prennent le contrôle du quotidien Pravda. Le 3 avril Lénine arrive de Suisse et prend sa place –centrale – dans la direction bolchevique.
Quelle révolution, dirigée par qui?
Nous allons essayer de résumer l’évolution des événements entre la révolution de février et le mois d’avril. Mais d’abord, regardons les positions des différents courants sociaux-démocrates avant 1917. Depuis la création des premier groupes dans les années 1880, tous les marxistes russes, tous les courants sociaux-démocrates, considéraient que la révolution à venir – et ils croyaient tous qu’elle viendrait– sera bourgeoise/démocratique. C’est-à-dire, qu’elle débarrasserait la Russie des restes du féodalisme/absolutisme, de la monarchie tsariste, de l’appareil d’Etat civil et militaire, du pouvoir des grands propriétaires fonciers, et déblayerait le terrain pour le libre développement du capitalisme et avec lui de la classe ouvrière. Seulement à ce moment-là, la révolution socialiste pourrait-elle être à l’ordre du jour. Mais cette unanimité sur le caractère de la révolution ne disait rien sur les forces qui devraient la diriger.
Les mencheviks avaient une position apparemment logique: puisque la révolution serait bourgeoise, elle devrait être dirigée par la bourgeoisie et le prolétariat devrait faire alliance avec et soutenir cette bourgeoisie, de manière critique, afin que le capitalisme puisse développer et créer les bases du socialisme. Cette position, qui partait du niveau de développement des forces productives, avait un gros inconvénient: elle ne prenait pas en compte la bourgeoisie russe réellement existante et ses rapports avec d’un côté le tsarisme et de l’autre la classe ouvrière. En fait, elle avait beaucoup plus peur des ouvriers et paysans, surtout après 1905, que de la monarchie et de l’aristocratie. Donc l’idée que la bourgeoisie russe allait jouer un rôle révolutionnaire en Russie, comme elle l’avait fait dans les révolutions anglaise et française entrait en conflit avec la réalité. La révolution bourgeoise en Russie sera mort-née.
Les bolcheviks, eux, ne faisaient pas la même erreur: ils n’accordaient aucun rôle révolutionnaire à la bourgeoisie, et Lénine en particulier polémiquait sans cesse contre toute alliance avec des forces bourgeoises et surtout avec le principal parti bourgeois, les Cadets. La perspective des bolcheviks était que la révolution bourgeoise devrait être dirigée par une alliance entre les ouvriers et les paysans: ils utilisaient la formule «dictature démocratique révolutionnaire du prolétariat et de la paysannerie» (1). C’était aussi la position de Rosa Luxembourg, qui insistait portant davantage sur le rôle dirigeant du prolétariat. Enfin, il y avait la position de Trotsky, qui défendait l’idée que la révolution devrait bien être dirigée par le prolétariat mais que ce serait alors impossible qu’elle s’arrête à l’étape bourgeoise: elle devait se poursuivre vers la révolution socialiste.
Lénine revient
Pour prendre le mois d’avril chronologiquement, il y avait d’abord le retour de Lénine. Avant de quitter la Suisse, il avait envoyé une série de lettres à ses camarades, connues sous le nom de «Lettres de loin». Seulement la première, fortement censurée, a été publiée dans la Pravda. Les rayures concernaient l’attitude du parti envers la guerre et le Gouvernement provisoire. On va voir pourquoi. Depuis la formation du Soviet, celui-ci était dirigé par des mencheviks et des socialistes-révolutionnaires, sur une position de soutien critique vis-à-vis du Gouvernement provisoire. Sur la question de la guerre, la majorité menchevik-SR au Soviet acceptait la participation continue de la Russie à la guerre impérialiste, tout en souhaitant une paix négociée, ce qui allait bientôt créer des problèmes avec le Gouvernement provisoire. Globalement, le bloc menchevik-SR défendait la situation de double pouvoir, d’un gouvernement provisoire soutenu, mais surveillé par le Soviet. Au mois de mars, et pendant encore quelques mois, cette position correspondait à l’opinion majoritaire parmi les ouvriers et les soldats, dont les représentants siégeaient au Soviet.
Le triumvirat qui avait dirigé les bolcheviks à Petrograd (2) depuis février maintenait une position d’indépendance à l’égard du Gouvernement provisoire et d’opposition à la guerre, ainsi que la perspective d’un gouvernement provisoire révolutionnaire, qui était souvent utilisé comme expression populaire de la «dictature démocratique». Staline et Kamenev, au contraire, vacillaient, s’adaptant à la pression de la majorité dans le Soviet et dans l’opinion ouvrière sur les deux questions clefs de la guerre et de l’attitude envers le gouvernement provisoire. Il ne s’agissait pas d’une divergence programmatique. Le triumvirat aussi bien que Staline et Kamenev se réclamaient de la dictature démocratique, souvent caractérisée comme «formule algébrique» et susceptible d’interprétations différentes.
Lénine, lui, en était venu à considérer que la révolution bourgeoise s’était terminée avec la formation d’un gouvernement bourgeois. Ce gouvernement avait adopté quelques positions progressistes – suffrage universel, amnistie générale, libertés démocratiques fondamentales, abolition de la peine de mort, suppression des discriminations basées sur la race, caste ou religion, auto-détermination pour la Finlande et la Pologne. Mais sur des questions fondamentales, on ne pouvait rien attendre de ce gouvernement. Quelles ont été ces questions? Elles se résument dans le slogan célèbre des bolcheviks: «Le Pain, la paix, la terre». La paix était impossible tant que le gouvernement tenait à ses buts de guerre en termes d’expansion territoriale et à son alliance avec les impérialismes et le capital britannique et français. Donner la terre aux paysans aurait impliqué un affrontement avec les grands propriétaires fonciers et leurs soutiens, y compris parmi les militaires, dont beaucoup étaient issus de cette classe. «Pain» ne signifiait pas seulement le droit de ne plus avoir faim. Pour les ouvriers, cela signifiait aussi des salaires corrects, des horaires de travail soutenables, un contrôle de leurs conditions de travail. Dans les mois qui suivaient la révolution de février furent mis sur pied des comités d’usine. Non seulement les ouvriers ont obtenu la journée de huit heures et des augmentations de salaires (vite rongées par l’inflation): ils ont établi le contrôle sur les embauches et les licenciements et, plus largement, sur les conditions du travail et le fonctionnement de leur entreprise.
Un changement brusque d’orientation
Lénine expliquait que la seule façon d’obtenir la paix et la terre pour les paysans, ainsi que de garantir les droits démocratiques et les acquis ouvriers issus de la révolution de février, était de passer de la révolution bourgeoise à la révolution socialiste. Ce qui signifiait que les soviets prennent le pouvoir et créent un nouvel État basé sur la classe ouvrière et ses alliés. Il s’agissait donc d’abandonner la formule de la «dictature démocratique» et de poser la question d’une dictature du prolétariat allié à la paysannerie pauvre.
Il existe des débats, notamment parmi des historiens anglophones, sur la politique bolchevique entre février et avril, qui dépassent largement le cadre de cet article. Ce qui semble indiscutable, c’est que les nouvelles positions de Lénine faisaient l’effet d’une bombe. Bien reçues par Vyborg, elles choquaient manifestement beaucoup de cadres du parti, qui demandaient pourquoi on abandonnait le concept de dictature démocratique. Lénine partait à l’attaque tout de suite. A peine descendu du train qui l’avait amené de Suisse, il apostrophe Kamenev: «Qu’est-ce que c’est que vous écrivez dans la Pravda? Nous en avons vu quelques numéros et nous vous avons vraiment maudits». A côté de ses célèbres Thèses d’Avril qui résumaient la nouvelle orientation, Lénine écrivait des «Lettres sur la tactique», où il expliquait de manière très claire que la dictature démocratique était dépassée, qu’elle avait trouvé son expression d’une certaine manière dans le Soviet dominé par les mencheviks et les SR (dont la base était dans la paysannerie). Il défendait sa nouvelle orientation, obtenant la majorité dans une conférence du parti fin avril. Staline s’est rallié à lui. C’est Kamenev qui menait l’opposition et qui restera jusqu’en octobre le représentant d’un certain nombre de cadres bolcheviques qui défendaient une ligne conservatrice, voire, pour certains d’entre eux, s’opposeraient à la prise du pouvoir en octobre.
Cette droite allait coexister avec la gauche dirigée par Lénine, un centre et une ultragauche, qui voulait forcer le pas de l’histoire, cherchant à prendre le pouvoir de manière prématurée. Lénine, lui, était très clair. La nouvelle orientation, qui sera bientôt résumée par le mot d’ordre «Tout le pouvoir aux soviets», n’était pas une revendication immédiate, ni un appel à l’action. C’était une ligne stratégique, une expression de ce qui était nécessaire, mais qui ne deviendrait pas une perspective immédiate avant que la majorité d’ouvriers et soldats en soit convaincue et que cela se reflète dans les soviets. Pour les mencheviks, le double pouvoir était une orientation politique, l’expression de l’alliance souvent conflictuelle, mais finalement collaborative entre les soviets et le gouvernement. Pour les bolcheviks, le double pouvoir était une contradiction à résoudre pour affirmer le pouvoir des soviets. On pourrait en dire autant pour les partis bourgeois: à court terme, ce double pouvoir était utile pour renforcer leur propre faible légitimité, mais l’autorité du Soviet limitait aussi leur marge de manœuvre et à un moment il aurait fallu s’en débarrasser.
La «crise d’avril»
C’est une démonstration de l’autorité du Soviet qui allait déclencher la crise d’avril. Le 14 mars, le Soviet avait publié un «manifeste aux peuples du monde» exprimant la position de sa majorité pour une paix sans annexions ni indemnités, tout en défendant la participation continue de la Russie à la guerre. Ce manifeste était bien reçu par la masse des ouvriers et surtout par les soldats qui vouaient en finir avec la boucherie au plus vite. Mais pas par les membres du gouvernement et notamment son homme fort Pavel Milioukov, qui croyait que la Russie serait plus forte pour mener la guerre après la chute du tsarisme. Quand Milioukov réaffirmait dans une interview le 23 mars les objectifs de la Russie d’annexer la partie ukrainienne de l’empire autrichien, ainsi que Constantinople et les Dardanelles, le Soviet s’est mis en colère. Le gouvernement a été obligé d’adopter une position plus proche de celle du Soviet et s’engager à la communiquer à ses alliés.
Le gouvernement a tenu sa promesse et envoyé sa déclaration à ses alliés le 18 avril, accompagnée d’une note de Milioukov les assurant essentiellement que rien ne changerait. La publication de cette note a déclenché la crise. Les 20 et 21 avril, des milliers de manifestants sont descendus dans la rue avec des mots d’ordre «A bas Milioukov», «A bas les politiques d’annexion», et même «A bas le Gouvernement provisoire».
C’était la première fois que des ouvriers et des soldats descendaient dans la rue contre le Gouvernement provisoire. La conséquence immédiate était la démission de Milioukov et du Ministre de la Guerre, Gouchkov. Cela affaiblissait évidemment le gouvernement. Le Soviet a donc pris position pour un gouvernement de coalition et le 5 mai le deuxième Gouvernement provisoire était constitué, avec six ministres menchevik et SR et neuf des partis bourgeois.
Avec l’adoption par les bolcheviks des Thèses de Lénine et l’entrée des mencheviks au gouvernement, l’opposition entre les deux lignes est devenue absolument claire. D’un côté, aucune confiance dans le Gouvernement provisoire, aucune alliance avec la bourgeoisie et la perspective de «Tout le pouvoir aux soviets». De l’autre, non seulement la collaboration avec le Gouvernement provisoire mais la participation à ce gouvernement qui cherchait de plus en plus à consolider l’ordre bourgeois. Les bolcheviks allaient tenir leur orientation pendant des mois où ils étaient minoritaires. Les mencheviks tiendront aussi la leur, même quand leur base se tournait vers les bolcheviks.
Notes
- De nos jours, le mot de ‘dictature’, utilisé sans sens péjoratif, sonne étrangement, surtout lié à ‘démocratique’. Mais à l’époque, avant les dictatures sanglantes du 20e siècle, elle servait à décrire la réalité ou la perspective de la domination d’une classe ou d’une alliance de classes.
- Avant 1914 le nom de la capitale de la Russie était Saint-Pétersbourg. Elle est devenue Petrograd par décision du gouvernement, qui ne voulait pas de nom à consonance allemande. Pour ne pas céder à la xénophobie, les bolcheviks ont continué à parler de Pétersbourg pendant la guerre. Mais à partir de 1917, le nom Petrograd était généralement accepté, même pour le nom du Soviet.
28-04-2017
Faut –il réformer les hôpitaux au Luxembourg?
La question des structures hospitalières domine le débat de politique de santé au Grand-Duché depuis des années. Les pressions des congrégations religieuses, avides d’hégémonie, et des municipalités, intéressées à garder une pléthore d’emplois, ont fini par créer une situation de surcapacité à laquelle le gouvernement entend mettre fin en limitant le nombre de lits dans le cadre d’un plan hospitalier rigoureux, dont la mise en œuvre a été difficile dans le passé. En effet, l’État subventionne la construction et le maintien des installations pharaoniques, mais ne contrôle rien en termes de retombées sur la santé.
Il était donc grand temps de changer hardiment la gouvernance des hôpitaux en créant un conseil d’administration limitant le pouvoir de décision des médecins, qui décidaient dans une perspective marchande et inflationniste de l’acquisition d’équipements, leur permettant de multiplier les actes techniques et donc leurs revenus. La réforme mettra fin à ce type de conflit d’intérêt, qui a sapé le développement d’une médecine rationnelle et efficace depuis des lustres. L’opposition féroce de la corporation des médecins n’est donc pas une surprise.
Cependant, le fait que les hôpitaux sont organisés d’une façon peu efficace n’est pas la principale raison de la très faible performance du système de santé luxembourgeois, telle que mesurée par l’OCDE. Mais c’est plutôt le fait qu’ils conditionnent l’absence de structures adéquates de soins de santé primaires accessibles et pertinents, mais aussi de politique de prévention intervenant sur la santé de la population dans son ensemble.
L’hygiéniste allemand Max Von Pettenkofer s’était permis de démontrer ceci déjà en 1847 en comparant la santé de Munichois et de Londoniens et, à sa suite, une cohorte incroyable de travaux ont continué à apporter inlassablement les mêmes preuves , qui hélas , n’ont fait l’objet d’aucune ordonnance politique.
L’explosion des maladies non transmissibles comme le diabète, l’hypertension et les problèmes de santé mentale, tous liés et influencés par des déterminants sociaux et environnementaux, comme l’industrialisation de l’alimentation, imposent d’écarter les malades des lits hospitaliers, afin de les soigner dans des structures de proximité actives à long terme.
Certains syndicalistes ont peur de la nécessaire réduction des lits, car ils voient pointer derrière celle-ci des pertes d’emplois, comme si des structures de maisons médicales ne pourraient pas créer davantage d’emplois valorisants.
A défaut d’une réforme globale et profonde, créant un service national de santé se basant sur une médecine pluridisciplinaire et salariée, donnant la priorité à l’accès aux soins de base, cette énième réforme, malgré bien des aspects moralisants et positifs, représentera de nouveau l’application diligente du cautère sur la jambe de bois .
28-04-2017
Erster Mai für Arbeit oder Ende der Arbeit?
Am 1. Mai geht es um Arbeit für alle, auch zukünftig für die Jugend. In der Regierung, die den Hellseher Jeremy Rifkin gerufen hat, um die Zukunft des Ländchens zu deuten, geht es u.a. um das Ende der Arbeit. „Computer und Roboter werden die Produktion richten.“ In der eben gelaufenen ersten Runde des französischen Wahlkampfs um die Präsidentschaft hatte der, von der eigenen Partei verratene Kandidat der PS, Benoît Hamon Positionen eingebracht, die von denen Rifkins inspiriert scheinen. Es ist nun Zeit, Klärung zu diesen Fragen herbei zu führen.
Wenn also am 1. Mai eine Reihe von bürgerlichen Politikern auf den Maifeiern herumstolzieren, sollten sie sich bewusst sein, dass sie sich in einem Widerspruch bewegen, den man ihnen unter die Nase halten könnte.
Unbewiesene Prognosen
In den USA sollen in absehbarer Zeit 47% (laut Frey & Osborne) der Arbeitslätze durch neue Technologien ersetzt werden – Robotik, kognitiver Kapitalismus, Automatisierung, immaterielle Produktion – so sagt man. Rifkin hat sich diese Prognose zu eigen gemacht. Dabei glaubt kaum einer noch daran. Die OECD spricht von der Wahrscheinlichkeit, dass 9% der US-amerikanischen Arbeitsplätze verschwinden könnten. Man muss sich auch daran erinnern, dass bei der Verallgemeinerung der Computer ebenfalls schon von der Massenvernichtung der Arbeitsplätze geredet wurde.
Wenn es tatsächlich im Westen einen konsequenten Abbau von industriellen Arbeitsplätzen gegeben hat, so ist dies auf den Drang der Kapitalisten zurück zu führen, eine möglichst hohe Ausbeutungsrate zu erreichen, und die erreicht man nun einmal besser in den armen Ländern, wohin die Produktion dann auch verlagert wurde. Die Smartphones werden bekanntlich nicht in der Silicon Valley produziert. Weltweit haben sich die industriellen Arbeitsplätze zwischen 1950 und 2005 verzehnfacht.
Es bleibt auch zu verifizieren, inwiefern Arbeitsposten und Arbeitsplätze verwechselt werden. Es gibt keine Heizer im öffentlichen Transport mehr, und nach einem starken Abbau von Arbeitsplätzen in der Nachkriegszeit, durch den Abbau vieler Strecken und die Explosion des Individualverkehrs, steigt nun die Zahl der Arbeitsplätze in diesem Sektor ständig.
Diese Bemerkungen müssten durch die Erörterung einer anderen grundsätzlichen Frage der Funktionsweise des Kapitalismus ergänzt werden. Wie steht es mit der doppelten Natur der Schaffenden als Produzenten und Konsumenten? Roboter kaufen keine Waren, sie haben keine Kaufkraft. Wir wollen uns aber mit einer anderen Frage grundsätzlicher Natur befassen.
„Das Paradoxon von Solow“ – Informatisierung und Produktivität
„Computer sieht man überall, nur nicht in den Produktivitätsstatistiken“, so lautete die Aussage vom Wirtschaftsnobelpreisträger Solow, dessen Forschungsresultate eigentlich darauf hinausliefen, dass Produktivitätsgewinne nicht von der Arbeit oder dem Kapital herrühren, sondern von den Faktoren (den technologischen Neuerungen). Er hat somit aufgrund der Statistiken seine eigenen Theorien relativiert. In den 30 Nachkriegsjahren waren die technologischen Neuerungen bereits gewaltig, und doch herrschte quasi Vollbeschäftigung. Der Anstieg der Arbeitslosigkeit im Anschluss an die „30 glorieuses“ geht einher mit einem Schwinden der Produktivitätsgewinne.
Die Arbeiten des marxistischen Wirtschaftswissenschaftlers Michel Husson, der sich auf dem Gebiet der Ökonometrie spezialisiert hat, liefern aufschlussreiche Schlussfolgerungen. Die Gewinne an Arbeitsproduktivität sinken bedeutend seit 2007/8 und zwar weltweit, selbst in den emergenten Wirtschaften, wo sie seit Mitte der 90ger Jahre dramatisch gewachsen waren. Hingegen stoßen die Lehren Rifkins in Luxemburg auf eine Situation, in der die Zahl der Arbeitsplätze ständig wächst und nicht wenig infrastrukturelle Probleme schafft, ohne dass die Prosumers dabei eine Rolle spielten. Prosumers wären Produzenten und Konsumenten in einer Person, doch ist dies eigentlich nichts Neues; die Proletarier alten Stils waren dies auch.
Selbst wenn die neuesten Technologien zu einem bedeutenden Anstieg der Produktivität und zu immer mehr Prekarität im Arbeitsleben führen würden, gäbe es immer noch die Alternative – und da wären wir wieder beim 1.Mai – die gesetzliche Arbeitszeit ebenso bedeutend zu senken. Stattdessen setzen die Prediger der 3. industriellen Revolution (in Deutschland spricht man von der 4.) auf ein völliges Umdenken in Sachen Arbeit. Wohnungen und Transmittel teilen, es hat was von sozialem und ökologischem Flair. AirBnB, Uber, Blablacar…haben auch Einzug in Luxemburg gehalten. Es ist modern, kann also nicht schlecht sein?
In einer Studie der OECD von Mai 2016 (Automatisierung und unabhängige Arbeit in einer numerischen Wirtschaft) wird gemeldet: „Zu diesem Zeitpunkt haben die unabhängigen Arbeiter kein Recht auf Arbeitslosenunterstützung in 19 OECD-Ländern von 34 und haben kein Recht auf Zulagen bei einem Arbeitsunfall in 10 Ländern.“ Die Frage muss berechtigt sein, wer daran verdient. Es sind die privaten Netzwerke, die Anbieter und Kunden zusammen bringen, wie die Immobilienhaie es tun und es ist der schlanke Staat, der sich aus der Verantwortung stiehlt.
Bedingungsloses Grundeinkommen mitten im Neoliberalismus?
Verständlicherweise begegnen die Salariatsorganisationen der Forderung nach einem „Bedingungslosen Grundeinkommen“ mit größtem Vorbehalt. Hamon, eigentlich ein Linker in der Sozialdemokratie, hatte versucht, es zu einem Thema in der Wahlkampagne zu machen, doch es drang nicht wirklich durch. Die Idee findet aber durchaus Gehör in einem Teil der liberalen Kreise, die die Gelegenheit beim Schopf fassen wollen, den Sozialstaat ad acta zu legen.
Das bedingungslose Grundeinkommen könnte eine erstrebenswerte Idee für ein Leben in einer zukünftigen sozialistischen und ökologischen Gesellschaft sein. Unter den gegenwärtigen Kräfteverhältnissen des immer noch dominierenden Neoliberalismus wäre es Gift für die Errungenschaften der Arbeiterbewegung. Die Diskussion soll mit dieser Feststellung nicht abgewürgt, sondern in den rechten Kontext gestellt werden.
In letzter Instanz sind sowohl die Positionen der neuen Gurus à la Rifkin, wie auch der Anhänger des Grundeinkommens, wie auch das (gegensätzliche) Erstarken des Populismus ein Ausdruck der tiefen Orientierungskrise unserer faulenden bürgerlichen Gesellschaft, die weder den Bedürfnissen einer wachsenden Zahl von sozial ausgeschlossenen Menschen eine Perspektive liefern, noch der bedrohlichen, weltweiten ökologischen Krise wirksam begegnen kann. Der gemeinsame Nenner ist: so kann es nicht weiter gehen. Im Luxemburger Ländchen sollte man hinzufügen: Zum Träumen brauchen wir keine Gurus.
28-04-2017
Regard critique sur le programme économique de Jean-Luc Mélenchon
Nous publions ci-dessous une contribution critique sur le programme économique de Jean-Luc Mélenchon. Il est certes utile de se pencher sur cet aspect du programme du candidat de la France insoumise. Il nous semble pourtant qu’il faut préalablement analyser la campagne de Mélenchon dans son ensemble, en prenant en compte son programme aussi bien que la mobilisation déclenchée par la campagne et les perspectives qu’elle a ouvertes. Et ensuite qu’une critique du programme économique mériterait d’être beaucoup plus équilibrée et moins unilatéralement négative. Nous publions néanmoins ce texte comme contribution à la discussion. Le Comité de rédaction
Qui connaît réellement le programme économique du candidat de la « France insoumise »? Élément clé d’une politique gouvernementale, ce point du programme sera déterminant pour le succès ou la déroute d’un futur président de gauche. L’expérience de Syriza nous a démontré qu’une confiance aveugle peut très vite mener à la catastrophe et que des analyses critiques sont recommandées.
L’objectif déclaré est la relance de l’économie par un emprunt de 100 milliards d’euros et une hausse des dépenses publiques. Un taux de chômage de 6,2% est envisagé pour la fin du mandat (ce qui est supérieur au taux actuel des États-Unis et de l’Allemagne). Le salaire minimum serait augmenté de 15% et porté à 1326.-€ net par mois. La retraite serait fixée à 60 ans après 40 ans de cotisations. En fait, c’est déjà tout ou presque! A part une baisse de l’impôt sur les sociétés de 33 à 25%, il n’y a rien de spectaculaire. Le programme de l’homme de la providence se résume à une banale orientation néo-keynésienne et est bien moins radical que le programme de l’union de la gauche en 1981 sous Mitterrand!
Le problème me semble que Mélenchon est perçu comme un sauveur suprême, un tribun du peuple qui cristallise les espoirs de la classe ouvrière avec des discours radicaux à la Danton ou Robespierre, souvent sur des questions secondaires, mais qui en substance est seulement porteur d’un projet social-démocrate extrêmement limité, servi à la sauce nationaliste de la révolution française, qui, grâce à son panache, a su déclencher une dynamique réelle chez le peuple de gauche, mais sans aucun rapport avec le contenu réel de son programme.
Les résistances de la société capitaliste sont criminellement sous-estimées. Aucune leçon de la débâcle grecque n’est tirée par l’équipe de Mélenchon. De même l’obstruction de l’UE, de l’Allemagne et des marchés internationaux est totalement négligée. Mélenchon pense contourner le problème avec des phrases comme: «le problème, c’est la rente, ce n’est pas l’entreprise», pour faire la séparation entre le méchant «capitalisme financier» et le bon «patron producteur» et créateur d’emplois, reprenant les mythes de la séparation entre finance et production. Son programme ne permet pas de rompre avec la logique du marché et nourrit les illusions d’une cohabitation possible entre économie du profit et économie solidaire. C’est une pure illusion. Si Mélenchon prenait des mesures fiscales et sociales susceptibles de peser sur les profits des grands groupes industriels français, il devrait faire face directement à des résistances massives, comme la fuite des capitaux, l’augmentation des taux d’intérêt de la dette, la grève d’investissements, le boycottage du FMI, etc…
Les grandes marques du programme économique et politique de Mélenchon sont donc les incursions dans la propriété capitaliste et la mobilisation populaire. En ce qui concerne la question stratégique des banques, il parle seulement d’un pôle public bancaire, sans toucher à l’essentiel des banques privées. Quant à la mobilisation ouvrière, elle ne se décrète pas, mais elle se construit. Les travailleurs ne défendront qu’un pouvoir qui aura su améliorer immédiatement leurs conditions de vies, qui aura manifesté la volonté d’un changement radical de la société. Des réductions massives du temps de travail, des augmentations importantes de salaire, les interdictions de licenciements, le contrôle des mouvements de capitaux et la socialisation du système bancaire sont les éléments fondamentaux pour indiquer la direction et démarrer les mobilisations. Si Mélenchon avait voulu éviter de prendre le chemin de Hollande (et de Tsipras) après une éventuelle victoire, il aurait dû se préparer à un affrontement avec le capital.
28-04-2017
En France, les lendemains du 23 avril
Les derniers jours avant le premier tour des élections présidentielles ont bien été le reflet d’une campagne marquée par des tournants brusques et des événements inattendus.
En fin de compte, les deux premiers, Macron et Le Pen, qui se confronteront au deuxième tour, étaient ceux prédits par les sondages. Mais jusqu’au soir du 23 avril le résultat était ouvert. Quatre candidats se battaient dans un mouchoir de poche. En attendant le verdict des urnes le 7 mai, essayons de tirer quelques leçons de cette campagne inédite.
D’abord, comme prévu, pour la première fois de l’histoire de la Ve République, il n’y aura pas de représentant au second tour du centre-gauche social-démocrate, ni de la droite traditionnelle. Le candidat du PS, Benoît Hamon, avec 6,13%, a enregistré le pire résultat de son courant depuis 1969. Le PS est maintenant traversé par des projets différents et contradictoires: soit une refondation du parti d’Epinay, comme le souhaite Hamon entre autres; soit la création d’un parti démocrate à l’italienne, comme le prône ouvertement Manuel Valls, avec le soutien discret de François Hollande. C’est ce parti, en crise et profondément divisé, qui a été impacté par la campagne d’Emmanuel Macron et le serait davantage par sa victoire le 7 mai. Malheureusement pour Valls, si un parti démocrate voit le jour, son chef ne sera pas lui mais Macron.
La crise des partis traditionnels
La crise de la droite est moins flagrante, mais néanmoins réelle. Avec la victoire de Fillon dans les primaires Les Républicains ont viré à droite, vers un thatchérisme à la française sur le plan économique et un conservatisme catholique sur le plan sociétal. La présence dans le parti et dans la campagne de Fillon du courant d’ extrême droite Sens Commun, dont les effectifs sont estimés par Le Monde Diplomatique à 9,000 membres, et qui est issu du mouvement de la Manif pour tous, qui a mobilisé contre le mariage pour tous, pose problème pour l’aile du parti représenté par Alain Juppé. Des fissures, qui ont été colmatées pendant la campagne présidentielle, vont émerger de nouveau. Déjà il a été annoncé que la campagne législative ne sera pas dirigée par Fillon. Pourtant ce dernier, malgré les scandales qui ont entouré sa campagne, a failli être au deuxième tour. Il n’est probablement pas prêt à prendre sa retraite.
Le score de Marine Le Pen est le plus élevé du Front national à l’élection présidentielle et elle arrive au deuxième tour. Ce n’est pourtant pas un triomphe. Son score final a été de 20,72%. Quand on sait que le FN a fait 25% aux municipales de 2014 et 27% aux régionales de 2015, et qu’elle a commencé la campagne avec 25% dans les sondages en montant jusqu’à 27 %, c’est décevant. Elle a fini la campagne, devancée par Macron et talonnée par Fillon et Mélenchon.
Macron arrive en tête avec 24,5%. Les titres de deux encarts dans le Quotidien du 24 avril résument bien de qui il est le candidat et par qui il a été soutenu: «Les marchés euphoriques» et «Le candidat des investisseurs». Il est peut-être un peu tôt pour l’euphorie, mais Macron est bien le candidat des investisseurs. Et des banquiers. Et de l’Europe de la finance et des multinationales. Et de la mondialisation financière. Il a été soutenu pendant la campagne par la plus grande partie des média en France, mais aussi en Europe. Sa campagne a été soutenue et sa victoire saluée par Juncker, Merkel, Schulz, Renzi, George Osborne et le ban et l’arrière-ban de l’Europe libérale. Fillon aurait été acceptable pour tout ce beau monde, mais il était un peu critique de l’Union européenne, un peu trop mou sur la Russie. Macron est parfait: sur l’Europe, sur la mondialisation, sur les «réformes» qu’il faut imposer en France. Son programme était moins extrême que celui de Fillon? La réalité pourrait être différente. L’année dernière, en plein mouvement de masse contre la loi Khomri qui démantelait partiellement le Code du travail, il donne une interview aux Échos (23 mai, 2016), «Il faut aller plus loin que la loi Khomri»; dit-il. Et il le fera s’il a la possibilité.
La campagne de Mélenchon
Dans ce panorama désolant le résultat de Jean-Luc Mélenchon brille. Sa progression dans les sondages a été interrompue par l’entrée en campagne de Benoît Hamon. Mais il a battu Hamon politiquement et recommencé à monter pour finir à deux doigts du deuxième tour, avec 19,24%. Mélenchon arrive le premier dans trois départements de la métropole (Seine-Saint-Denis, Dordogne, Ariège), et trois d’outre-mer (Martinique, Guyane, Saint-Pierre et Miquelon). Il cartonne dans de nombreuses villes d’une banlieue parisienne qui est moins rouge qu’avant, mais néanmoins bien plus qu’on ne le dit souvent.
Il arrive aussi en tête dans quatre des dix villes les plus grandes de France (Marseille, Montpellier, Lille, Toulouse). Il est le premier parmi les 18-24 ans (29%) et parmi les moins de 35 ans (26%). Dans l’électorat populaire, il le dispute à Marine Le Pen. Chez les ouvriers, la candidate du FN fait 34% et Mélenchon 24%; parmi les chômeurs les chiffres sont 30% et 27,5% chez les employés, Le Pen fait 30,1% et Mélenchon 23,1%. Il gagne aussi les suffrages de 37% des électeurs musulmans, plus que les autres candidats.
Les chiffres cités ci-dessus sont tirés d’une enquête de l’IFOP, dont le directeur adjoint, Frédéric Dabi, résume le vote de Mélenchon ainsi: «C’est un vote de classe». L’historien Roger Martelli (1), ancien cadre du PCF qui milite aujourd’hui à Ensemble, développe davantage l’analyse. «Dans l’ensemble, le vote Jean-Luc Mélenchon s’insère dans l’espace électoral, communal et départemental, qui fut celui du communisme français, à quoi s’ajoute une implantation (notamment dans le Sud-Ouest) plus proche de celui de la gauche socialiste traditionnelle».
Ce que le score de Mélenchon démontre, entre autres, est qu’il n’y a rien de fatal dans la progression du Front national dans les couches populaires et la jeunesse. La montée de l’extrême droite se nourrit, en France comme ailleurs, de l‘austérité, des inégalités, du chômage, des attaques contre l’État social. Tout cela est renforcé par le rôle des partis traditionnels et surtout par les renoncements de la social-démocratie. Mais la montée de l’extrême droite progresse aussi par l’inexistence, les faiblesses ou les erreurs de la gauche radicale. Quand celle-ci se dote d’un programme qui apporte des réponses et une stratégie politique, on peut enrayer la montée de l’extrême droite. Sinon, qui d’autre, dans le monde du centre, versions gauche et droite, pourra le faire?
Que faire au deuxième tour?
Nous sommes maintenant confrontés à un deuxième tour Macron-Le Pen. Comme Chirac-Le Pen en 2002? Oui et non. Les choix se ressemblent, le contexte est assez différent. En 2002 les deux semaines entre les deux tours ont été ponctuées par d’énormes manifestations contre le Front national, culminant avec 1,3 millions de personnes dans la rue le 1er mai, dont 400,000 à Paris. Cette fois-ci, la seule chose prévue semble être une manifestation le 1er mai. Il est peu probable qu’elle ressemble à celle de 2002. A gauche, et notamment dans l’électorat de Mélenchon, mais aussi parmi les militants qui ont fait sa campagne, on s’interroge. Depuis 2002, nous avons eu trois quinquennats, ceux de Chirac, Sarkozy et Hollande. Au bout du compte, nous sommes toujours à presque 10% de chômeurs, 25% parmi les moins de 25 ans, une montée d’inégalités, de la précarité, nous avons toujours des banlieues miséreuses et les cités laissées pour compte. Les forces politiques qui ont occupé le pouvoir depuis 15 ans n’ont rien apporté aux couches populaires, aux salariés, aux jeunes. Et Macron est largement perçu par eux pour ce qu’il est. Néanmoins, au moins la moitié des électeurs de Mélenchon va probablement voter Macron pour bloquer Le Pen. Une petite minorité risque de voter le Pen, beaucoup peuvent s’abstenir. Mélenchon a eu raison de ne pas ajouter sa voix au chœur des «défenseurs de la démocratie». Il a raison de consulter la base de la France insoumise, d’avoir le débat. Le Parti de gauche va donner sa position au cours d’un Conseil national samedi. La consultation de la France insoumise se terminera mardi prochain. Le choix est entre le vote Macron, l’abstention/vote blanc ou aucune consigne. On verra le résultat.
Si on peut comprendre ceux qui rechignent à voter Macron, on peut penser qu’ils ont tort. Il faut empêcher Le Pen de passer. Pas parce qu’elle est ‘populiste’, protectionniste ou à cause de ses positions sur l’Europe. Mais tout simplement parce que les pouvoirs de la présidence française sont considérables (plus que ceux de Trump aux États-Unis), surtout en état d’urgence. Une présidence Le Pen représenterait une menace considérable pour les libertés politiques et les droits sociaux, sans parler des populations visées par son discours raciste et xénophobe. Il ne faut pas prendre le risque. Cela n’implique évidemment aucune confiance en Macron, qu’il faut combattre dès maintenant. De plus, si le vote pour Macron peut bloquer Le Pen le 7 mai, une présidence Macron continuerait à alimenter le Front national. Comme le dit Serge Halimi (Le Monde Diplomatique d’avril), «le projet d’Emmanuel Macron, c’est le marchepied du Front national»). Il faut faire échec à Macron et construire une puissante alternative de gauche.
Une victoire de Le Pen reste improbable, mais pas impossible. Elle a commencé sa campagne du deuxième tour par une visite à l’usine Whirlpool d’Amiens, menacée de fermeture, où elle a laissé Macron discuter en ville avec les responsables syndicaux pour aller, elle, directement sur le site. Titre du Financial Times ce matin: «Des ouvriers en colère conspuent Macron, saluent Le Pen». Elle risque de mener une campagne centrée sur le social, la défense des salariés français, dénonçant l’UE et la mondialisation. Il ne faut pas en sous-estimer le potentiel. Elle s’adresse déjà directement aux électeurs de Mélenchon. Elle a même intérêt à mettre un bémol sur l’immigration: les racistes, elle les a déjà dans sa poche. Si Macron gagne quand même, ce sera en grande partie par défaut, par vote contre Le Pen plutôt que pour lui.
Après le deuxième tour s’ouvrira la campagne des législatives. Que ce soit Macron ou Le Pen qui gagne, l’important sera de se mettre en mode de combat tout de suite. Ce sera important que, dans la foulée de la campagne de Mélenchon, il y ait une forte présence de la gauche radicale à l’Assemblée nationale.